Robin Decourcy

Carnet de résidence
COREOGRAFIA REAL — MUNDO BANDIDO, Jungle Equatorienne et Perou
mai 2015
José, 2014
© Robin Decourcy

RÉSIDENCES D’ARTISTE

IMPROHUASCA, workshops, Jungle Équatorienne, Association Arutam - Zéro Déforestation, Octobre - Novembre 2014.
COREOGRAFIA REAL*, workshops, écriture & photos, Équateur et Pérou, Novembre - Décembre 2014.
MUNDO BANDIDO *, écriture & rencontres, Décembre 2014 / laboratoire-test à Arbories en France, Septembre 2015.

 * Performance et exposition en cours de construction 

Robin Decourcy est parti deux semaines en Jungle Équatorienne, avec l'Association Arutam - Zéro Déforestation, association historique, engagée dans la défense des territoires et des savoirs indigènes créé par le pharmacien et écrivain Jean Patrick Costa, et accompagné par celui-ci.

Le sujet de recherche est la continuité de ses études comparatives entre pratiques de l'art expérimental - improvisatoire et les transes thérapeutiques ou Etats de Conscience Altérée. À partir de cette expérience dont il a extrait différentes matières (sonores, dansées), il entreprend le scénario d'une exposition et d'une performance sous le nom de COREOGRAFIA REAL. Celles-ci, liées à la ville de Quito (capitale de l'Equateur) analysent et ré-explorent le folklore, le tourisme et le quotidien d'un pays mal-compris et mal-connu d'Amérique du Sud.

La résidence de recherche se poursuit et se transforme au Pérou pendant un mois, pendant lequel Robin Decourcy donne différents workshops (à La Tarumba, école de Cirque de Lima et à l'école de Danse Contemporaine de l'Université de Lima), poursuivant certaines pistes développées dans le projet d'analyse COREOGRAFIA REAL. La ville de Lima, un voyage de rencontres dans le sud du Pérou et à Cusco, lui permettent d'établir un premier plan sur un projet au long cours, considérant directement le sujet de la Transe Improvisatoire en contexte social et urbain. Ce nouveau projet du nom de MUNDO BANDIDO est actuellement en cours de dialogue et de construction avec différentes structures péruviennes et françaises.

Llegar a Lima
Video : Coregrafia Real - Robin Decourcy
Musica : Tonada triste - Horacio Duran
Merci à Yohann Mahuteau



Projet en Equateur - COREOGRAFIA REAL

La performance COREOGRAFIA REAL, préparée pendant une à deux semaines d’observation et d’actions dansées, dans les rues de Quito, prend naissance au milieu des spectateurs. Les questions et réflexions qui vont nourrir cette action centrale, viennent d’une position particulière par rapport à la réalité. A savoir : et si le mouvement du quotidien des personnes était une danse en soi ?

Los Actores 2, Série Coreografia Real, Ecole de la Tarumba, Lima, image et crédits : Robin Decourcy
Los Actores 1, Série Coréografia Real, Procession à Quito, image et crédits : Robin Decourcy

Les photos qui suivent sont extraites d’un corpus qui constitue une des approches analytiques du projet COREOGRAFIA REAL.

Le projet s’intéresse de manière plus large au contexte historique de l’Amérique du Sud où le folklore, l’artisanat, la tradition et le rite traversent la modernité au quotidien. Les esthétiques et les préoccupations matérielles s’y entrechoquent mais les confluences sont possibles, à même la rue. L’ « épiphanie » spectaculaire en est d’autant plus probante.

L’une des modalités de travail que j’utilise est de s’asseoir dehors comme un spectateur et d’observer un cadre choisi, pendant un temps déterminé, comme si un spectacle commençait. Puis dans un deuxième temps, d’échanger sur ses impressions, ou d’intervenir directement en tant que performers ou improvisateurs. De ces exercices notamment découle l’exposition COREOGRAFIA REAL, et son questionnement sur le réel.

Los Spectatores 1, Série Coreografia Real, Ecole de la Tarumba, LIMA, image et crédits : Robin Decourcy
Los Actores 3, 4, 5, 6, Série Coréografia Real, Quito, Arequipa, image et crédits : Robin Decourcy



Projet au Pérou - MUNDO BANDIDO

Transe & Improvisation en société

Depuis des millénaires, médiums, danseurs, poètes et chamanes visitent cet état non reconnu d’une psyché immanente et poreuse pour ramener messages, œuvres, thérapies, mais il n’a jamais été question pour l’instant d’en constituer un champ d’étude pratique, appliquable ou utilitaire dans nos sociétés contemporaines, au contraire. Seuls, à ma connaissance, certains artistes ont rouvert la « boîte de Pandore », en proposant l’improvisation comme source de directions explicites et prometteuses, telles les partitions du théâtre futuriste, celles de la chorégraphe révolutionnaire Anna Halprin, du Mouvement Fluxus, ou plus récemment dans les protocoles de certaines performances artistiques et activistes. 

Plusieurs outils de transe improvisatoire arrivent à leur maturité et peuvent aujourd’hui rencontrer la sphère publique, sociale et politique ainsi que différentes spécialités du monde scientifique. Or, le travail de l’improvisation artistique semble croiser en de nombreux points l’histoire de la transe médiumnique. De nombreuses techniques somatiques de l’art vivant (contact improvisation, composition instantanée) créent les ressources holistiques capables de développer de nouvelles capacités d’entendement, de décryptage de notre monde. Ce projet part donc de l’intention de mettre à vue et en analyse une pratique exploratoire récente de l’histoire en résonance avec le chamanisme péruvien et certaines pratiques de transe en Amérique du Sud.
Malgré le regain d’intérêt international que suscitent les pratiques chamaniques et l’intégration de ses techniques au développement personnel, il semble que de nombreux « professeurs » de la forêt aient du mal à trouver des successeurs à leurs savoirs et que l’appropriation de leurs territoires ait mis fin au chamanisme de communauté.

Amiyacu, Equateur, image et crédits : Robin Decourcy

« Aujourd’hui, presque tous les peuples chamaniques, d’une manière ou d’une autre, sont liés au modèle occidental dont ils dépendent pour leur survie. Spoliés d’une grande partie de leur territoire, ils ont été sédentarisés de force, voire déplacés, de telle sorte qu’ils perdent leur autonomie. Ces nouvelles conditions ne permettent plus au chamanisme de s’exprimer pleinement en tant que système de pensée autonome appliquée à la communauté. Si bien que les chamanes voient leur domaine d’action se limiter à une partie de la vie courante : en Inde, les chamans Saora se sont spécialisés dans les rites funéraires, en Corée dans la divination et la purification des lieux, en Amérique du Nord dans les célébrations communautaires, partout ailleurs, la guérison reste leur domaine de prédilection. Cette fragmentation du chamanisme peut s’interpréter comme une manière de résister et de survivre. Délaissant leurs fonctions généralistes au service de la communauté, les chamans autochtones sont aujourd’hui soit des guides spirituels, soit des professionnels de la santé, des artistes ou des poètes traduisant dans la matière un ressenti d’ordre chamanique. Ils incarnent l’attachement à la tradition dans un monde pluri-ethnique et multi-culturel. Ils sont devenus les symboles de la résistance ethnique, même si parfois certaines de leurs activités ressemblent à s’y méprendre à un... spectacle folklorique.» 

Jean Patrick Costa, Les chamans hier et aujourd’hui, éditions Arutam, 2005

Synopsis du projet (en cours de réalisation) 

Une équipe d’improvisateurs internationaux va participer à deux expérimentations de transe urbaine et environnementale dans des conditions exceptionnelles et faire le sujet d’un bureau d’étude scientifique en sciences sociales, en biologie et en anthropologie. 6 à 8 performers déambulent dans la campagne de Cusco puis dans la ville de Lima pendant 6 jours à partir de techniques d’improvisation continue. Pour cela, ils sont entourés d’un groupe de tuteurs qui sécurise et archive l’expérience ainsi que d’un Laboratoire d’Observation et de Recherche invitant scientifiques, artistes et professeurs. Cette première mondiale donnera naissance à quatre productions principales, un spectacle conférence & performance, une installation plastique et vidéo, un documentaire et une édition.

 

« Ce qui m’intéresse, c’est un théâtre où tout serait éprouvé comme pour la première fois, un théâtre tout en risque, en spontanéité, en mise à nu et en intensité.

Je veux que public et danseur fassent équipe.

J’ai rejeté toute attache avec les formes de danse conventionnelle – la vie d’un danseur, la formation, les répétitions et les représentations – en échange d’un processus qui est en lui-même l’expérience.

Je remonte aux rituels fondateurs de l’art, j’y vois une expression exaltée de la vie.

Je souhaite amplifier chaque mode de perception.

Je veux participer à des évènements d’une authenticité suprême et relier les individus et leur monde, pour que la vie soit vécue comme un tout. »

Anna Halprin, Ce que je crois et de quelle manière, Mouvements de vie, Editions Contredanse, 1968. 

Performers et tuteurs / vue occultée, image et crédits : Robin Decourcy



Le programme de résidence d’artistes est organisé par l'Association Avaleur,

avec le soutien de l'Association Arutam,

en collaboration avec l'Université de Lima, l'Ecole de cirque la Tarumba - LIMA, l'Ecole Agarrate Catalina - LIMA, le MAC - Museo d'Arte ContemporaneoPUCP, Artes Escenicas - LIMA et le CAC - Centro d'Arte Contemporaneo - QUITO.