Auvergne-Rhône-Alpes

Julien Guinand

Né en 1975

Vit et travaille à Lyon

« Je n'éprouve pas d'intérêt à accumuler les prises de vue et je crois que je n'ai pas de fascination particulière pour l'image en général... Je procède par soustraction et il m'arrive de ne garder, parfois à mon grand désespoir, à peine plus de deux ou trois photographies par an, déclare Julien Guinand dans sa belle monographie publiée aux éditions Deux cent cinq.

Au sein même de chacune de ses images, il y a aussi soustraction, un "moins 1" qui ouvre discrètement une brèche, déchire la totalité, fêle l'insupportable fascination... Des lévriers effilés pris de profil sur un champ de course ont des attitudes à la fois fières et burlesques, de grandes nappes blanches accrochées à un étendage dans une cour pourraient constituer une œuvre d'art minimaliste parfaite si ce n'était ce sac plastique boursouflé au pied d'un buisson en arrière plan... Il y a toujours un accroc prosaïque, un "punctum", un accident qui empêche l'image de s'enrouler sur elle-même, dans le narcissisme forclos de sa propre beauté miroitante...

Atteindre ainsi à une quasi perfection formelle et zen (philosophie très influente sur le photographe) tout en laissant soudain et comme par inadvertance le "réel" creuser son trou rigolard ou anecdotique a toujours quelque chose de touchant dans le travail de Julien Guinand. Ce peut être encore un chiffon jaune en bas d'un tableau, la sortie d'une bouche d'égout à côté d'une jeune femme triste... L'accident peut être aussi très littéralement l'une de ces prises de vues de "barrières de crash test" pour expérimenter les collisions d'automobiles. La concentration achoppe, la méditation échoue et sont en cela poignantes, humaines, intrigantes. » (...)

Extrait de Dans le presque, le parfait, Jean-Emmanuel Denave, Le Petit Bulletin, 2012

© Adagp, Paris